vendredi 18 décembre 2009

L'irresponsable développement du chauffage électrique


par Bertrand Vrain


Bon sang, il fait froid et voilà qu’EDF prévient qu’il pourrait y avoir coupure de courant, ce qui ne manque pas de faire ressortir la demande de croissance des moyens de production qui seraient donc insuffisant pour répondre à la demande ; c’est à peu près la même chose chaque année en fonction de la rigueur de l’hiver. Nous avons voté à Nantes l’excellente délibération sur une OPAH audit énergétique au dernier conseil municipal. Rappelons que la moitié des aides du CCAS concernent des difficultés pour payer l’énergie et en premier lieu l’électricité : les personnes modestes ont parfois du mal à se payer des installations de chauffage performantes pour des locaux qui sont souvent des passoires thermiques. Le chauffage avec des convecteurs électriques est souvent, dans ces conditions, la cause de ces malheurs.

Mais pourquoi donc nous risquons la coupure de courant ? Parce que le chauffage électrique, qui équipe au moins 60% des logements neufs, est très sollicité car il fait froid : la puissance appelée maximale, en ce moment 90 000 MW environs, dépasse et de loin la même pointe de 19 heures un mois plus tôt à moins de 70 000 MW qui elle-même était largement supérieure au creux de 16 heures à moins de 60 000 MW, dépassant largement le creux de la nuit à moins de 50 000 MW. Ainsi, faire varier la puissance de plus de 50 % nécessite le recours aux moyens de production très médiocres en rendement, turbines à gaz ou centrales thermiques à flamme, particulièrement émetteurs de CO2.

Ces variations de puissance se font sur un rendement global de production électrique particulièrement mauvais : 1 KWh utilisé à la prise de courant nécessite au moins 3 KWh en production à la centrale, résultat du principe même des centrales à condensation, qu’elles soient thermiques classiques ou nucléaires.

Contrairement aux dires des promoteurs du chauffage électrique, celui-ci n’est pas sans émission de CO2. Alors que le nucléaire n’émet en moyenne que 50 gCO2/KWh, le recours aux moyens de production utilisant des combustibles fossiles fait monter ce chiffre à 600 gCO2/KWh voire plus, ce qui est très loin du bilan d’un chauffage gaz où les rejets sont de 200 gCO2/KWh/PCI. N’oublions pas que la moitié environs de la consommation de chauffage se produit pendant les 4 semaines les plus froides de la saison.

EDF a promu le chauffage électrique dès le début des années 70, bien avant la montée du nucléaire fin 70. Depuis, le phénomène n’a cessé de s’accroître avec un lobby très puissant, y compris dans les collectivités locales, épaulé par tous les partisans de la croissance à tout prix. Cette offensive d’épicier de la part d’EDF a pu s’étendre en raison du faible coût d’installation du chauffage électrique : un grille pain par pièce et c’est bon ; les promoteurs laissent la facture de fonctionnement aux occupants des logements. Cette dérive est très dangereuse car elle crée un déséquilibre du réseau électrique obligeant des importations de courant aux heures de pointe ; notre structure de production électrique est donc incroyablement fragile et dépendante. C’est l’exemple même d’une utilisation irrationnelle de l’énergie à l’encontre d’une sobriété que nous appelons de nos voeux.

La sortie de cette spirale infernale implique non seulement l’arrêt du chauffage électrique dans les logements neufs, fussent-ils à basse consommation, mais sa reconversion en chauffage central classique associé à une isolation renforcée des bâtiments. Nous en sommes loin et le rôle des collectivités locales est fondamental. Force est de constater, au vu d’exemples récents, que nous n’y sommes pas, y compris à Nantes.

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